Art Athina 2024 se tiendra au Zappeion Megaron du 19 au 23 septembre. Cliquez ici pour plus d'informations.
« Il n'y a rien de nouveau dans l'art. » Que ce soit devant une installation numérique d'art contemporain étudiée ou en regardant la série Netflix de la semaine, nous avons tous été témoins de divers degrés de familiarité et de déjà-vu dans toutes les formes de contenu que nous consommons. Dans le monde de l'art, la parthénogénèse (pour marquer notre influence grecque) est probablement la plus grande des questions. Peut-on vraiment parler d'originalité ? Pour certains (ou pour la plupart), la question a déjà reçu une réponse : non, il n'existe pas d'œuvre d'art réellement originale. Toutefois, pour être honnête, nous ne vous avons donné qu'une partie de la citation originale d'Anton Tchekhov. L'ensemble de la citation s'énonce comme suit « Il n'y a rien de nouveau dans l'art, sauf le talent ». Et voilà sans doute la clé pour se démarquer, le talent.
Au fil des siècles, Athènes a certainement connu sa part de talent dans les arts, sous certaines formes plus que d'autres. Afin de ne pas faire une énième ouverture sur le passé d'Athènes - aussi glorieux soit-il - nous allons passer délicatement au-dessus du Parthénon, de Sophocle et du reste de la bande d'anciens pour nous concentrer sur ceux qui façonnent notre présent. Et en ce qui concerne l'art contemporain à Athènes, notre « ici et maintenant » n'aurait pas été le même sans le talent et le travail des personnes à l'origine d'Art Athina, la plus grande foire d'arts visuels du pays et l'une des plus anciennes d'Europe.
Rencontre d’art contemporain
Créée en 1993 par l'Association Hellénique des Galeries d'Art, la première édition d'Art Athina s'intitulait « Une rencontre d'art contemporain » et présentait un total de 18 galeries grecques. L'édition de cette année accueille 71 galeries d'art du monde entier, d'Athènes à Paris, en passant par Montevideo et Cluj-Napoca. Elle comporte des sections distinctes pour les galeries d'art indépendantes, les projets vidéo, les programmes éducatifs pour les enfants et bien plus encore. « Chaque année, Art Athina offre à ses visiteurs, le temps de quelques jours, un aperçu des dernières tendances en matière d'arts visuels, un regard sur les œuvres d'artistes internationaux de renom, ainsi que la possibilité de se familiariser avec quelques œuvres d'art qui ont marqué l'histoire », souligne Mme Yianna Grammatopoulou, présidente de l'Association des galeries d'art helléniques et propriétaire de la galerie d'art Ekfrasi - Yianna Grammatopoulou. Au cours de ses 30 années d'existence, Art Athina a notamment exposé les œuvres de Jannis Kounellis, Le Corbusier, David Hockney, Costas Varotsos (The Runner), Andy Warhol, Yannis Gaitis et Opy Zouni, pour n'en citer que quelques-uns parmi la très longue liste.
Dans une ville en constante mutation, Art Athina a su montrer sa capacité d'adaptation à plusieurs reprises. La crise financière de 2010 a entraîné la multiplication de petites galeries d'art alternatives (les Grecs savent comment transformer leurs difficultés en expression artistique), qui, avec les expositions audacieuses des galeries établies de longue date dans la ville, ont mis en lumière la fertilité créative d'Athènes. Mais c'est en 2017, lorsque l'exposition internationale d'art contemporain Documenta a choisi Athènes comme ville coorganisatrice, que des milliers d'artistes, de conservateurs et d'amateurs d'art ont été attirés par notre ville pendant plus de cent jours. Ce n'est peut-être pas un hasard non plus si en 2017, Art Athina a décidé qu'il était temps de se renouveler. La foire d'art a été rebaptisée et a pris une nouvelle direction. « L'art ne reste pas indifférent au climat social de chaque époque. Au contraire, son rôle est vital. Comme partout dans le monde, la crise du COVID nous a beaucoup affectés. La digitalisation de l'évènement nous a cependant permis de maintenir le cap. Avec cette initiative, notre public s'est élargi, en Grèce comme à l'étranger », explique Mme Grammatopoulou.
En plus de l’aide inestimable apportée par Art Athina, Athènes a bénéficié, ces dernières années, d'un coup de pouce bienvenu de la part du gouvernement et d'initiatives privées. Le Musée national d'art contemporain tant attendu a trouvé sa place dans le quartier de Koukaki après plusieurs faux départs, Onassis Stegi continue de repousser les limites de l'art contemporain, NEON a transformé une partie de l'ancienne manufacture de tabac en une magnifique salle d'exposition, Renzo Piano a doté notre ville d'un exemple de développement durable à la pointe de la technologie, et un véritable quartier artistique a vu le jour sur les anciens bâtiments industriels du Pirée.
Rencontre avec les esthètes d'Athènes
Outre les donations et différents soutiens financiers, ce sont les galeristes d'Athènes qui façonnent l'identité culturelle moderne de la ville, exposition après exposition. Nous avons contacté la crème de la crème de la scène artistique contemporaine locale et leur avons posé des questions sur Athènes, l'art et tout ce qui se trouve entre les deux. Découvrez Athènes à travers les yeux de ses acteurs artistiques majeurs.
Yianna Grammatopoulou
Présidente de l'Association des galeries d'art helléniques / Ekfrasi - Yianna Grammatopoulou Art Gallery
Si Athènes était une œuvre d'art, quelle forme prendrait-elle ?
Une sculpture complexe, aux multiples facettes, dont chaque courbe révélerait un aspect différent de la ville.
Peut-on considérer les graffitis comme une forme d’art ? Quelle est votre fresque préférée ?
L'un des plus récents de la ville se trouve à Metaxourgio et s'intitule « So Many Books, So Little Time » (Tant de livres, si peu de temps), de SimpleG. Une réflexion bienvenue sur l'addiction à internet de notre époque.
Quel est votre endroit préféré de la ville, endroit où se mêlent le passé et le présent ?
Les rues autour de la place Syntagma, où les merveilles imaginées par Ernst Ziller coexistent avec les vestiges des anciens remparts de la ville et l'architecture du XXe siècle.
Comment la scène artistique locale a-t-elle évolué au cours de ces 30 dernières années avec Art Athina ?
De manière impressionnante. La ville est parsemée de petits groupes créatifs, car un grand nombre de galeries et d'espaces artistiques ont surgi de nulle part. Le lien entre ces jeunes espaces et la scène artistique locale plus traditionnelle est très stimulant.
Où se trouve votre galerie ? Pourquoi avoir choisi ce quartier ?
Dans la rue piétonne Valaoritou à Kolonaki. J'adore le fait qu'elle soit à deux pas du cœur d'Athènes, la place Syntagma.
« Je crois que même un aperçu fugace d'une œuvre d'art a le pouvoir de planter une graine dans le cœur du voyageur pressé. »
Quelle est, selon vous, la chose la plus inspirante à Athènes ?
Ses innombrables façades. Son intemporalité.
Avez-vous quelques endroits secrets à nous partager ?
Promenez-vous le long de la rue Valaoritou et arrêtez-vous pour une pause café chez Jimmy's, ou pour un after work chez Il Gatto rue Voukourestiou.
Quel moment mémorable d'Art Athina vous vient à l'esprit ?
Notre première édition post-COVID en 2022. Tout le monde était très enthousiaste à l'idée de se retrouver dans le même espace. Chaque jour, les gens faisaient la queue pour assister aux expositions. Cela témoigne de l'influence qu'Art Athina a exercée sur les amateurs d'art de la ville au cours de ces trois dernières décennies.
Quelle est la forme d'art la plus inhabituelle ou la plus créative que vous ayez rencontrée dans votre vie quotidienne à Athènes ?
J'adore les œuvres d'art que l'on trouve dans les stations de métro d'Athènes. Je crois que même un aperçu fugace d'une œuvre d'art a le pouvoir de planter une graine dans le cœur du voyageur pressé.
Antonis Kourkoulos
Coordinateur général d'Art Athina
Si Athènes était une œuvre d'art, quel forme prendrait-elle ?
Une immense installation interactive, invitant le public à s'y engager et à en faire partie.
Peut-on considérer les graffitis comme une forme d’art ? Quelle est votre fresque préférée ?
Évidemment. Ma fresque préférée est « She Who Protects » d'Aristeidis Lappas dans la rue Panepistimiou, que l'on voit idéalement depuis la place Omonia.
Quel est votre endroit préféré de la ville, endroit où se mêlent le passé et le présent ?
Place Kotzia. Du site archéologique de la zone et du magnifique bâtiment de la Banque nationale conçu par Mario Botta, aux immeubles de bureaux des années 1980 environnants, en passant par les joyaux néoclassiques.
Comment la scène artistique locale a-t-elle évolué au cours de ces 30 dernières années avec Art Athina ?
On assiste à un formidable essor des galeries et des espaces artistiques indépendants dans tous les quartiers d'Athènes. Des acteurs plus importants, tels que des organisations et des institutions comme le Musée national d'art contemporain, Stegi et, bien sûr, NEON, repoussent les limites chaque année.
Quelle est, selon vous, la chose la plus inspirante à Athènes ?
Son ouverture d' et sa capacité à vous surprendre à chaque instant.
Avez-vous quelques endroits secrets à nous partager ?
Une promenade à Neos Kosmos et Tavros, deux quartiers athéniens sans prétention, truffés de tavernes discrètes.
Quelle est la forme d'art la plus inhabituelle ou la plus créative que vous ayez rencontrée dans votre vie quotidienne à Athènes ?
Tout ce qu'on peut voir en se promenant le long de Fokionos Negri et dans les rues étroites de Kypseli.
Rebecca Camhi
Galerie Rebecca Camhi
Si Athènes était une œuvre d'art, quelle forme prendrait-elle ?
Ce serait une sculpture, une sculpture vraiment étrange avec un mélange de tous les styles et de toutes les formes. Car la ville est elle-même un mélange du passé, du présent, de l'ancien, du nouveau, du frais et du décrépi.
Peut-on considérer les graffitis comme une forme d’art ? Quelle est votre fresque préférée ?
Malheureusement, je pense que les graffitis témoignent d'un manque de respect pour les espaces publics. Les visiteurs peuvent y voir un élément amusant, mais c'est très différent pour les habitants. Athènes, très animée, n'a pas beaucoup de place pour d’autres inscriptions. J'aime cependant une fresque récente, « The Kiss », par Ilias Papailiakis sur la place Avdi.
Quel est votre endroit préféré de la ville, endroit où se mêlent le passé et le présent ?
Keramikos abrite une boulangerie traditionnelle qui fabrique chaque jour du pain frais, des biscuits et des koulouria (couronnes de pain au sésame) sur place. À côté de cette boulangerie se trouve un complexe d'appartements très moderne où réside le président de la République hellénique.
Comment la scène artistique locale a-t-elle évolué au cours de ces 30 dernières années avec Art Athina ?
J'ai ouvert ma galerie il y a près de 30 ans, j'ai donc vraiment assisté à ce changement. Il existe aujourd’hui beaucoup de galeries d'art indépendantes, d'ateliers d'artistes ouverts, bref, une croissance merveilleuse de la scène locale.
Où se trouve votre galerie ? Pourquoi avoir choisi ce quartier ?
À Metaxourgio, un quartier plutôt sensible qui, je l'espère, se relèvera. Personnellement, je ne me contente pas d'espérer, je contribue activement à la revalorisation du quartier, en incitant la municipalité à aller dans ce sens. J'ai choisi ce quartier parce qu'il est très proche du centre-ville d'Athènes et parce qu'il était possible d'avoir un espace plus grand avec un budget plus restreint.
Quelle est, selon vous, la chose la plus inspirante à Athènes ?
Sa météo, son ciel bleu, son potentiel pour devenir une ville exceptionnelle à condition que nous prenions conscience du tournant vital qu'elle connaît actuellement. Des décisions importantes doivent être prises en ce qui concerne le ratio logement/location de courte durée/hôtel dans la ville, afin de préserver le mode de vie athénien tout en laissant la possibilité aux visiteurs d’en faire l’expérience.
Avez-vous quelques endroits secrets à nous partager ?
Le restaurant Seychelles à Keramikos est l'un de mes préférés. Diporto koutouki est l'un des derniers endroits authentiques où manger en ville. Martinos, dans le quartier Monastiraki, est la meilleure boutique d'antiquités de la ville. Elle abrite également un espace contemporain au dernier étage appelé Melas Martinos. À ne surtout pas manquer.
Quel moment mémorable d'Art Athina vous vient à l'esprit ?
Le moment le plus sympa a été lorsque beaucoup de mes anciens camarades de classe se sont retrouvés à mon stand par pur hasard. Une sorte de petite réunion ! On a toujours de bonnes chances de rencontrer de vieux amis et d'autres amateurs d'art à Art Athina - voilà ce qui compte pour moi !
« Martinos, dans le quartier Monastiraki, est la meilleure boutique d'antiquités de la ville. Elle abrite également un espace contemporain au dernier étage appelé Melas Martinos. À ne surtout pas manquer. »
Arsen Kalfayan and Roupen Kalfayan
Kalfayan Galleries
Si Athènes était une œuvre d'art, quelle forme prendrait-elle ?
Jackson Pollock rencontre Yannis Tsarouchis et l'Arte Povera.
Peut-on considérer les graffitis comme une forme d’art ? Quelle est votre fresque préférée ?
Les graffitis sans prétention sur les volets roulants des vieux magasins.
Quel est votre endroit préféré de la ville, endroit où se mêlent le passé et le présent ?
Se promener dans Athènes et découvrir le Jardin national. De l'agitation de la ville à l'atmosphère sereine du jardin, en compagnie des sculptures et de la richesse de la flore et de la faune, un voyage hors du temps.
Comment la scène artistique locale a-t-elle évolué au cours de ces 30 dernières années avec Art Athina ?
Le nombre de galeries d'art a augmenté et les liens avec la scène et le marché de l'art international se sont renforcés. Le public de l'art contemporain est plus large qu'il y a 30 ans. Art Athina a contribué de manière significative à la croissance et à la promotion de la scène artistique contemporaine. Elle a également rendu la scène locale de l'art contemporain plus compétitive, ce qui est à mon sens, une bonne chose.
Où se trouve votre galerie ? Pourquoi avoir choisi ce quartier ?
Notre galerie est située à Kolonaki, au cœur d'Athènes. Nous pensons que les galeries d'art devraient être situées dans le centre d'une ville et non dans des quartiers éloignés et soi-disant « branchés », et qu'elles devraient être facilement accessibles à tous, que vous soyez amateur d'art ou non.
Quelle est, selon vous, la chose la plus inspirante à Athènes ?
L’Acropole.
Avez-vous quelques endroits secrets à nous partager ?
Si on vous les partage, ce ne sera plus un secret.
Quel moment mémorable d'Art Athina vous vient à l'esprit ?
Notre toute première participation avec l'exposition solo de Tassos Pavlopoulos.
Quelle est la forme d'art la plus inhabituelle ou la plus créative que vous ayez rencontrée dans votre vie quotidienne à Athènes ?
Le periptero (kiosque) grec est une installation artistique à part entière. Malheureusement, il est amené à disparaître.
Marina Vranopoulou
Galerie Dio Horia
Si Athènes était une œuvre d'art, quelle forme prendrait-elle ?
Il pourrait s'agir d'une broderie de The Callas aux couleurs pop-folk vives, réalisée par leur mère et leur tante, avec des références à l'histoire d'Athènes. Une identité esthétique qui leur est propre.
Peut-on considérer les graffitis comme une forme d’art ? Quelle est votre fresque préférée ?
Ma fresque préférée est l'une des plus récentes sur lesquelles je suis tombé au cours de mes promenades à Athènes : « The Kiss » (Le Baiser) d'Ilias Papailiakis sur la place Avdi. C'est la démonstration parfaite que le graffiti peut devenir une forme d'art.
Quel est votre endroit préféré de la ville, endroit où se mêlent le passé et le présent ?
Il s’agit plutôt d’une vue, celle d'Athènes depuis le sommet de la colline de l'Acropole. Il s’agit d’une belle représentation de ce melting-pot qu’est Athènes. Un endroit où les monuments anciens, maisons décrépites, antennes de télévision, panneaux solaires, voitures et piétons se confondent.
Comment la scène artistique locale a-t-elle évolué au cours de ces 30 dernières années avec Art Athina ?
Athènes s'est définitivement imposée dans le monde de l'art au cours des dernières décennies, en particulier après la Documenta 14 en 2017. Une sorte de renaissance est en train de se produire, avec des expositions d'art dans de nouveaux lieux audacieux, des curateurs plus jeunes qui obtiennent des résultats notables, et une restructuration de la scène artistique de la ville.
« L'édition d'Art Athina que j'ai préférée est celle de 2022. Après deux ans de fermeture, j'ai eu l'impression que l'espoir était de retour ».
Où se trouve votre galerie ? Pourquoi avoir choisi ce quartier ?
En 2022, nous avons déménagé Dio Horia dans le quartier de l'Acropole, à deux pas du musée de l'Acropole. Il s'agit d'une villa urbaine de la fin de l'Antiquité, qui date du IVe siècle de notre ère. Le nouvel espace offre un mélange très inspirant d'ancien et moderne. L'énergie de la déesse Athéna est omniprésente, il s'agit d'un cadre idéal.
Quelle est, selon vous, la chose la plus inspirante à Athènes ?
Ses habitants. Les bons, les mauvais, les personnalités athéniennes typiques, les locaux récemment installés et les voyageurs enthousiastes.
Avez-vous quelques endroits secrets à nous partager ?
J'adore la beauté sans prétention et le cadre détendu de la plage d'Okeanida de Vouliagmeni. C'est mon lieu de prédilection tout au long de l'année, mais plus encore en hiver.
Quel moment mémorable d'Art Athina vous vient à l'esprit ?
L'édition d'Art Athina que j'ai préférée est celle de 2022. Après deux ans de fermeture, les gens faisaient à nouveau la queue pour admirer l'art contemporain. L'ambiance au Zappeion était détendue et festive, on sentait que l'espoir était de retour.
Quelle est la forme d'art la plus inhabituelle ou la plus créative que vous ayez rencontrée dans votre vie quotidienne à Athènes ?
Observer les créations artistiques des enfants en dehors du cadre de l'école.