Pas de dates, s’il vous plaît, nous sommes Grecs
Nous sommes là, prêts à découvrir le Parthénon dans toute sa splendeur et les dessous de la naissance de l'un des monuments les plus emblématiques du monde. Un petit-déjeuner grec traditionnel composé de yaourt grec avec du miel et des éclats de noisettes, arrosé d'une tasse de café, est notre récompense pour un départ si matinal : 8h30 ( du presque jamais vu à Athènes). Mais bientôt, s’être levé tôt se révèle la décision la plus sage. Alors que nous commençons notre ascension de la colline de l'Acropole, le fort soleil de l'Attique fait déjà sentir sa présence à notre groupe composé de quatre Britanniques, récemment arrivés en ville, et d’un Grec, comme porte-bonheur.
Notre guide Despina nous conduit dans un coin ombragé. Nous avons une vue dégagée sur le mont Lycabette, le point culminant d'Athènes. Ici, nous découvrons pourquoi les anciens Grecs ont choisi la colline sous laquelle nous nous trouvons pour construire leur citadelle légendaire, plutôt que le mont Lycabette.
"Bien que le mont Lycabette soit plus haut, et en toute logique un lieu plus stratégique pour construire l'Acropole, il ne possède pas de source d'eau", nous explique Despina. La colline de l'Acropole, découvrons-nous en revanche, possède des sources d'eau douce, capables de subvenir aux besoins de la population qui trouvait refuge dans l’enceinte de ses murs pendant les périodes de siège (qui étaient nombreux !).
Despina poursuit en expliquant ce qui différencie cette « Visite Guidée Premium de l'Acropole » des autres. Il ne s'agit pas seulement des friandises (bien qu'il y en ait beaucoup qui nous attendent) mais de la volonté de faire comprendre aux visiteurs ce que l'Acropole signifiait vraiment pour les anciens Grecs, et leur donner un aperçu de la vie ici dans les temps anciens.
Despina souligne : « Nous avons une règle stricte : pas de date ». Pourquoi? Parce que les dates ne nous aident pas à comprendre l'important. Oh, et nous pouvons aussi éviter la (longue) file d'attente et de nous diriger directement vers l'Acropole.
Un chantier de construction épique
À mi-chemin des pentes de la colline de l'Acropole, la prochaine zone d’ombre stratégique dans laquelle Despina choisit de nous faire nous arrêter, semble banale. Ce ne sont que des dalles de pierre géantes sans aucune fonction évidente. Despina explique que nous sommes en fait dans un ancien chantier de construction et que si les pierres semblent inachevées, c'est parce qu'elles le sont. Les signes révélateurs sont les éléments qui dépassent des bords lisses de chaque bloc de marbre. Des poignées de transport, apparemment. L'Acropole a été construite à partir de marbre pentélique (extrait du Mont Penteli, à 20 km), traîné jusqu’ ici par des bœufs.
« Dans la banlieue de Chalandri, vous pouvez encore voir les traces des chemins qu'ils utilisaient pour transférer le marbre des carrières jusqu'à la ville », nous révèle Despina.
Une fois arrivés ici, les ouvriers utilisaient des grues en bois (étonnamment avancées pour leur époque d’après les images que Despina nous montre) pour les mettre en place, avant de tailler les poignées de transport pour créer les surfaces de marbre parfaitement polies du Parthénon, tel que nous le connaissons. C'est un excellent aperçu des techniques de construction antiques.
Les anciennes épidémies et les visages changeants du Parthénon
Alors que nous continuons à grimper la colline de l'Acropole, Despina nous apprend que les pestes étaient une réalité assez courante de la vie ancienne. Manifestement, une épidémie majeure se produisait environ tous les 50 ans. Alors que nous avons à notre disposition nos masques et la science pour tenir à distance la menace actuelle du Covid, tous les anciens Athéniens devaient compter sur des offrandes aux dieux, comme Asclepious, le dieu de la médecine. C'est sûr que cela met les choses en perspective."Certaines de ces anciennes épidémies ont décimé jusqu'à la moitié des citoyens d'Athènes", nous raconte Despina.
Nous atteignons les Propylées et entrons dans l'ancienne citadelle de l'Acropole, où nous profitons d'une vue imprenable sur la colline de l'Aréopage, au nord-ouest (également connue sous le nom de colline d'Ares). Sous les puissantes colonnes doriques, nous entendons parler du génie géométrique et mathématique qui a fait du Parthénon l'une des réalisations architecturales les plus admirées de la planète. Nous apprenons également le secret pour savoir instantanément si un temple, où qu’il se situe dans le monde, est de conception grecque (pas de spoilers).
“ De loin, on dirait que le Parthénon est tout blanc, mais lorsque vous montez ici, vous pouvez clairement voir la différence entre les pierres les plus récentes et les plus anciennes », poursuit Despina en désignant la section restaurée d'une colonne plus claire.
Nous entamons notre descente de l'Acropole et laissons derrière nous la période antique. Despina nous explique comment le Parthénon a été converti en église chrétienne pendant la période byzantine, puis en mosquée islamique après la prise de la ville par l'empire ottoman. Voir ces transitions se refléter dans la ville en dessous de nous achève de nous convaincre : Athènes est un enchevêtrement complexe de constructions grecques, romaines, byzantines, ottomanes et modernes.
Douceurs et îles grecques dans la ville
Nous nous retrouvons soudain marchant le long de ruelles sinueuses, entourées de cottages fleuris blanchis à la chaux, et de chats endormis. Avons-nous été magiquement téléportés dans une île des Cyclades ? Non, nous sommes à Anafiotika. Ce charmant bout d'Athènes est le reflet des pittoresques maisons insulaires que les artisans qualifiés venus d'Anafi pour aider à construire la nouvelle capitale grecque après que les Grecs aient obtenu leur indépendance des Ottomans, laissèrent derrière eux.
En direction de Plaka, nous nous arrêtons plus bas sur la pente de la Tour des Vents, la première station météorologique au monde, créée par les anciens Grecs. Une fois de plus, il est temps de méditer sur le nombre de couches différentes de l'histoire qui s’étale devant nous, en même temps, dans un seul petit quartier d'Athènes : une ancienne station météorologique grecque, un marché romain, une mosquée ottomane et des villas grecques modernes de style néoclassique.
Despina attire notre attention sur une porte en bois sans prétention, logée dans un vieux mur de pierre à proximité. C'est tout ce qui reste d'un bâtiment de l'ère ottomane. Elle sert apparemment de passerelle vers une tranche sinistre de l'histoire athénienne.
« C'était autrefois, à l'époque ottomane, une belle école théologique islamique avec un immense jardin au milieu », précise Despina. « Mais plus tard, pendant le règne du roi Otto, elle a été transformé en prison, et les chambres sont devenues des cellules. Cet arbre était l'endroit où ils pendaient les condamnés à mort pour que tous les autres prisonniers puissent en être témoins.
« Et de cet arbre, vient le dicton grec : ‘Salut le platane pour nous’ (χαιρέτα μας τον πλάτανο), que nous utilisons lorsque quelqu’un pense qu’il n’entendra plus jamais parler de quelque chose, d’une relation vouée à l’échec par exemple.
Après ce passage plus sombre de l'histoire, nous passons à la vitesse supérieure pour terminer notre tournée sur une note plus enjouée. Nous traversons la place Monastiraki, le cœur de l'Athènes ottomane, pour rejoindre le quartier animé de Psirri. Ici, sur la place Iroon, avec une vue plongeante sur certaines des plus éminentes oeuvres d'arts de rue contemporaines d'Athènes, nous dégustons de délicieuses merveilles grecques : de la spanakopita (tarte aux épinards), de la tiropita (tarte au fromage) et une délicieuse pâtisserie, le bougatsa, la version grecque du mille-feuille. Rien ne vaut les fins heureuses.
Quel est le verdict?
Voici ce que mes deux amies, Freya venue du Royaume-Uni et Alexia qui vit en Grèce, en disent :
« Vous voyez l'Acropole tous les jours lorsque vous vous promenez dans Athènes, alors vous finissez par l'oublier un peu, d’une certaine manière. Mais après la visite guidée, vous comprenez vraiment que le Parthénon est bien plus qu'un vieux bâtiment au sommet d'un rocher.
« Despina est traditionnelle dans son approche mais tout sauf ennuyeuse. Elle est passionnée par son sujet et est clairement toujours ravie de partager ses histoires, sans les alourdir de détails insignifiants. J'ai trouvé ça vraiment captivant. »
- Durée: 3h30 minutes (dont 40 minutes de marche)
- Coût: 120 € (prix d'entrée et nourriture inclus)
- Temps: 8h30